Faut-il vivre soi-même les conséquences de la financiarisation de la santé pour se sentir concerné ?
Une nouvelle mélodie monte en toile de fond : la financiarisation de la santé est à nos portes dans l’indifférence du plus grand nombre…
Cette fameuse financiarisation que beaucoup d’entre nous expérimentent ou ont expérimentée dans d’autres secteurs d’activités !
Les grands groupes rachètent l’ensemble de soins existant dans les établissements de santé à but lucratif, car ils ont besoin de cette offre pour prendre beaucoup de parts de marché. Cela afin d’avoir un « pouvoir de marché » et se retrouver en position de force de façon à faire la pluie et le beau temps face aux pouvoirs publics.
Ces concentrations sont inquiétantes dans le milieu de la santé car elles menacent notre système de Sécurité Sociale qui, jusqu’à ce jour, était considéré comme l’un des meilleurs au monde, et la question n’est pas le profit qui permet de rentabiliser les projets, mais la « maxi » rentabilité et ses conséquences !
Dans le cas présent, elle entraine une détérioration de la qualité de service, ce qui est pourtant le plus important pour les patients, c’est-à-dire le temps passé auprès d’eux couplé de soins qualitatifs. Sans oublier la fermeture des centres médicaux pas assez rentables, avec l’inévitable désertification médicale.
La tribune Avenir Spé ►La médecine malade de la financiarisation nous apporte un éclairage sur : ce qu’elle est plus précisément, ce qu’elle n’est pas et ce qu’elle devrait être ; les multiples champs touchés ; l’urgence de réconcilier la valeur financière et le sens de l’action reliés à la règlementation des professions de santé qui est le pilier de la solidarité.
Avec la santé déshumanisée et les patients devenus des codes-barres, quand tout sera racheté, les générations suivantes de médecins, biologistes, dentistes, etc., ne seront plus que les ouvriers hautement qualifiés de ces grands groupes !
L’édito de Jacques ATTALI ►La vieillesse n’est pas un naufrage, elle est un dévoilement souligne l’étape dans laquelle les séniors entrent peu à peu : « La vieillesse est trop souvent présentée comme un moment où les gens ne sont plus eux-mêmes et s’enfoncent dans des délires qu’il vaut mieux mépriser. Plus généralement, la vieillesse n’est pas un naufrage (…), la vieillesse est un moment où beaucoup de gens, libérés de toute ambition de faire carrière et de toute obligation de plaire, de séduire, d’être aimé, se débarrassent de leur surmoi pour dire ce qu’ils pensent vraiment depuis longtemps, pour lâcher leurs coups, régler leurs comptes avec leurs proches et avec la société. (…) »
Un virage sociétal inattendu va peut-être émerger grâce aux « règlements de compte » des populations vieillissantes ? Qui sait ?
Après trois interventions chirurgicales cette année, on aurait pu croire que je suis entrée dans une routine en étant sereine face au confort apporté aux patients. Grosse erreur !
Si la situation n’était pas pathétique, je plaisanterais devant la dernière organisation mise en place pour « maximaliser » la rentabilité des chambres des patients : plus question d’y avoir accès avant l’intervention, se relaxer ne fait plus partie des priorités.
Je suis donc restée assise un certain temps sur une chaise qui n’a pas fait de cadeau à mes pauvres os vieillissants, en ayant l’impression d’être dans un hall de gare aux heures de pointe. Chaque patient attend au milieu d’un entremêlement d’aller-retour de visiteurs, brancardiers, techniciens et personnels médicaux…, en subissant les discussions dans l’attente de l’ascenseur encombré.
Puis, j’ai été accompagnée jusqu’à l’espace des cabines (avec ses casiers qui m’ont fait penser à l’ambiance des vestiaires des piscines) afin de m’armer de mon costume d’apparat pour le bloc.
Si par malchance votre bloc est du mauvais côté des vestiaires, mauvaise pioche ! Revêtus de votre tenue de combat, vous prendrez part au défilé dans le hall d’accueil en mettant votre pudeur et votre dignité dans votre poche.
Heureusement, les personnels qui vous prennent en charge ne sont pas encore déshumanisés et ils font leur maximum de façon à vous soutenir. Vous pouvez compter sur eux, mais jusqu’à quand ? A force de les pressurer, ne vont-ils pas finir par capituler ?
En effet, il n’est plus à démontrer que la crise sanitaire a montré les limites de nos modèles de société avec, entre autres, une usure des professionnels dans le secteur de la santé qui, par ricochet, rejoignent le ►Désenchantement face au monde du travail.
Le mauvais souvenir du petit garçon d’une compatriote rencontrée au Chili sous la dictature Pinochet me revient à l’esprit. Après avoir avalé de la mort-aux-rats, nous l’avons acheminé à l’hôpital dans un état comateux, et le verdict est tombé : les médecins ont annoncé qu’ils ne pouvaient plus rien faire pour lui…
Jusqu’au moment où la main du destin a frappé ! Un ami médecin de mes beaux-parents, venu par hasard visiter une de ses amies hospitalisée, m’aperçue au fond du couloir. Coup de fil à qui de droit à l’hôpital militaire, et un antidote est arrivé à grand renfort de relations afin de sauver le petit garçon.
N’allons-nous pas finir par entrer sur le chemin de la médecine à deux vitesses en France, celle qui offre une inégalité d’accès à la santé en fonction de son statut et de son portefeuille ?
Mis à part qu’il serait dommage que la médecine française perde sa bonne réputation à l’étranger, que va-t-on faire du serment d’Hippocrate ?